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Le potentiel des polycultures : 12 conseils pour l'utilisation de cultures fourragères mixtes 🎙️

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Les polycultures, les cultures intercalaires, les cultures de couverture et les cultures cocktails sont des termes diffĂ©rents qui englobent tous la plantation d’espèces de cultures mixtes pour l’alimentation du bĂ©tail. 

Les partisans des polycultures ont constatĂ© que le fait de mĂ©langer diffĂ©rentes espèces vĂ©gĂ©tales lors de la culture peut contribuer Ă  amĂ©liorer les sols en augmentant la diversitĂ© des systèmes racinaires, des communautĂ©s microbiologiques et de la matière organique. ComparĂ©es aux cultures en monoculture, les polycultures peuvent Ă©galement ĂŞtre plus rĂ©sistantes aux ravageurs et aux maladies. MĂŞme si les avantages sont largement mis de l’avant, comme pour toute pratique agricole, l’adoption d’une nouvelle approche exige une approche rĂ©aliste.  Â Â 

seeded polycrop mix
De nombreux producteurs sèment des polycultures de trois espèces ou plus dans l’espoir d’amĂ©liorer la production, la matière organique du sol, la microbiologie et la rĂ©silience. Voici 12 conseils pour l’utilisation des mĂ©langes de polycultures.

L’expĂ©rience d’une ferme de la Saskatchewan avec les polycultures en production  

Jocelyn Velestuk exploite une ferme familiale multigĂ©nĂ©rationnelle avec son mari, ses deux enfants et ses beaux-parents. L’exploitation mixte de cĂ©rĂ©ales et de vaches-veaux du sud-est de la Saskatchewan utilise les polycultures depuis quelques annĂ©es, dans le but premier d’amĂ©liorer ses sols.  

Avec une formation en recherche sur les sciences du sol, Jocelyn Ă©tait ravie d’inclure les polycultures dans leurs rotations. « Nous devions trouver un moyen de rendre nos terres plus productives, et j’ai donc commencĂ© Ă  me renseigner sur les cultures intercalaires et les polycultures », explique-t-elle. « Lorsque nous avons commencĂ© Ă  dĂ©cider si nous voulions nous lancer Ă  corps perdu dans ces cultures, nous avons eu de nombreuses conversations », ajoute-t-elle. Jocelyn admet qu’elle Ă©tait quelque peu sceptique parce qu’il n’y avait pas beaucoup de donnĂ©es scientifiques Ă  l’appui de certaines affirmations concernant les polycultures.  Â 

Ils ont eu l’occasion d’essayer les polycultures lorsqu’ils ont louĂ© un nouveau champ qui avait besoin de quelques amĂ©liorations. « Il y avait eu un labourage important », dĂ©crit-elle. « Le sol Ă©tait clairement en mauvais Ă©tat, la matière organique spongieuse manquait », ajoute-t-elle. « Les Ă©lĂ©ments nutritifs Ă©taient inexistants, notre sol Ă©tait très pauvre en Ă©lĂ©ments nutritifs. Sachant tout cela, mon mari et moi nous sommes demandĂ©s : comment allons-nous rĂ©ussir Ă  ĂŞtre rentables ? »   

Ils ont dĂ©cidĂ© que la façon la moins risquĂ©e d’incorporer les polycultures Ă©tait d’utiliser un mĂ©lange annuel qu’ils transformeraient en balles d’ensilage.

« Je peux y mettre n’importe quoi tant que nous avons le matĂ©riel », explique Jocelyn. « Je voulais m’assurer que nous ajoutions des systèmes racinaires », dit-elle. « Mes objectifs Ă©taient centrĂ©s sur l’obtention d’une rhizosphère et le rĂ©tablissement du fonctionnement du sol. Â»

« Nous avons essayĂ© le chou frisĂ© et le trèfle, ainsi qu’un mĂ©lange de cĂ©rĂ©ales avec de l’avoine et de l’orge, mais cela n’a pas donnĂ© grand-chose », admet-elle, ajoutant que les altises ont Ă©liminĂ© le chou frisĂ© qui devait constituer l’essentiel de la matière. Cela a tout de mĂŞme permis d’obtenir un fourrage convenable, mĂŞme si cela n’a pas Ă©tĂ© aussi productif qu’ils l’espĂ©raient.  Â 

La rhizosphère est la zone immédiate qui englobe les racines des plantes et le sol qui les entoure. On l’appelle parfois l’« interface racine-sol ». Il s’agit de la région influencée par les racines, leurs sécrétions ainsi que par les micro-organismes du sol.

L’annĂ©e suivante, ils ont dĂ©cidĂ© de simplifier davantage le mĂ©lange. « Nous avons conservĂ© le trèfle rouge, l’avoine et l’orge, qui ont constituĂ© d’excellents aliments pour animaux, avec une abondante production », explique-t-elle. Elle ajoute que ce faisant, ils ont constatĂ© moins de rouille dans les cĂ©rĂ©ales que lorsqu’elles Ă©taient cultivĂ©es en monoculture.  

MalgrĂ© quelques succès passĂ©s avec les polycultures, cette annĂ©e, les Velestuk ont encore simplifiĂ© leurs dĂ©cisions en matière de culture et ont dĂ©cidĂ© de s’en tenir uniquement Ă  l’orge. « Le prix de l’orge Ă©tant très Ă©levĂ© et ne sachant pas comment la rĂ©colte va ĂŞtre, si nous avons suffisamment d’ensilage et de fourrage vert, nous pouvons combiner le reste », explique Jocelyn. 

Recourir à la recherche pour en savoir plus sur la popularité des polycultures

Le Dr Bart Lardner, de l’universitĂ© de la Saskatchewan, explique que son Ă©quipe Ă©tudie les polycultures depuis qu’elles ont commencĂ© Ă  gagner en popularitĂ© il y a cinq ou dix ans.

« Le principe des polycultures est de garder la terre couverte plus longtemps pendant la saison de croissance et la saison de dormance », explique-t-il. Lardner ajoute : « Puis sont arrivĂ©s diffĂ©rents nouveaux mĂ©langes, espèces et combinaisons, dont certains Ă©taient peut-ĂŞtre – ou peut-ĂŞtre pas – adaptĂ©s Ă  l’Ouest canadien », ajoute Lardner.  

« Vous pouvez obtenir Ă  peu près tout ce que vous pouvez imaginer dans ce mĂ©lange, et vous verrez des mĂ©langes allant de trois espèces Ă  27 espèces », explique M. Lardner. « Je mets toujours au dĂ©fi les producteurs qui achètent des mĂ©langes complexes ou simples : ĂŞtes-vous sĂ»rs que les espèces 17 ou 23 vous ont apportĂ© quelque chose en termes de biomasse ? Si vous payez pour cela, vous voulez ĂŞtre sĂ»r que cela fonctionne », ajoute M. Lardner. Â 

« D’après notre expĂ©rience, il y a beaucoup d’affirmations concernant les polycultures, mais en tant que communautĂ© de recherche, nous devrions les examiner et les valider et ĂŞtre honnĂŞtes quant Ă  ce qui se passe. »  



Dr. Bart Larnder, Ministry of Agriculture Strategic Research Program Chair in Cow-Calf and Forage Systems at the University of Saskatchewan
Dr Bart Larnder, titulaire de la chaire du programme de recherche stratĂ©gique du ministère de l’Agriculture sur les systèmes vache-veau et fourrage Ă  l’universitĂ© de Saskatchewan

Grâce Ă  une collaboration entre le Livestock and Forage Centre of Excellence et Agriculture et Agroalimentaire Canada, Dr Lardner et son Ă©quipe Ă©valuent le rendement, la biomasse et la qualitĂ© des mĂ©langes de polycultures sur deux sites diffĂ©rents de la Saskatchewan. La recherche compare trois traitements : une monoculture d’avoine ; un mĂ©lange simple de quatre espèces d’avoine, de pois, de brassicacĂ©es et de vesce velue ainsi qu’un mĂ©lange complexe de huit espèces, en ajoutant du millet commun rouge, du teff, de la chicorĂ©e et de l’orge au mĂ©lange de quatre espèces. 

Après avoir examinĂ© les rĂ©sultats, Dr Lardner a constatĂ© que les rendements Ă©taient tout Ă  fait comparables entre les trois traitements d’avoine, le mĂ©lange de quatre espèces et le mĂ©lange de huit espèces, s’Ă©tablissant Ă  environ deux tonnes de matière sèche par hectare dans des conditions très sèches. « Nous avons Ă©galement constatĂ© une bonne teneur en protĂ©ines brutes, de 13 Ă  14 %, et une teneur en fibres dĂ©tergentes neutres d’environ 46 Ă  48 % », explique-t-il.  

La science dĂ©montre que les polycultures sont Ă©galement prometteuses sous terre. « L’avantage rĂ©side dans les diffĂ©rents systèmes racinaires, les racines fibreuses par rapport aux racines pivotantes », explique-t-il. « Nous observons une biomasse racinaire plus importante avec ces polycultures qu’avec les monocultures », ajoute-t-il, ajoutant qu’Ă  court terme, ils ont remarquĂ© que les polycultures ont augmentĂ© les niveaux de carbone organique du sol dans des zones qui en Ă©taient auparavant dĂ©pourvues.   

Cette Ă©tude en cours Ă©valuera les donnĂ©es afin de dĂ©terminer si les diffĂ©rents mĂ©langes ont produit des Ă©missions de gaz Ă  effet de serre diffĂ©rentes de la part des animaux pendant le pâturage. Les scientifiques continueront Ă©galement Ă  Ă©tudier l’Ă©volution du carbone organique du sol au fil du temps. 

Douze conseils pour l’utilisation des mĂ©langes de polyculture

1. Commencez par des mĂ©langes simples. Â« RĂ©flĂ©chissez Ă  deux fois avant d’acheter un mĂ©lange de 20 espèces », dit le Dr Lardner. « Optez pour la simplicitĂ© afin d’ĂŞtre sĂ»r que lorsque vous les ensemencerez, vous pourrez constater qu’elles contribuent au rendement. » Velestuk est d’accord et dit qu’ils essaient d’utiliser des plantes dont ils savent qu’elles sont dĂ©jĂ  adaptĂ©es Ă  leur rĂ©gion.

2. Commencez Ă  une plus petite Ă©chelle. « Ne faites pas de folies et ne semez pas un quart complet de votre terre, commencez peut-ĂŞtre par 10 ou 20 acres, voyez comment ce mĂ©lange fonctionne en fonction de votre situation, et voyez quel sera le rendement », dit Dr Lardner. 

3. Visez le succès. Jocelyn effectue des analyses de sol et choisit un mĂ©lange d’engrais personnalisĂ© pour rĂ©pondre Ă  leurs besoins spĂ©cifiques. « Nous avons bien fertilisĂ©, nous ne sommes pas radins, cela doit nourrir nos vaches », dit-elle.  

4. Test d’aliments. Dr Lardner conseille aux producteurs detester les aliments avant de faire paĂ®tre leurs animaux ou de leur donner des polycultures. Les agriculteurs doivent savoir que s’ils prĂ©voient d’utiliser les polycultures pour le pâturage d’automne ou d’hiver, en fonction de la classe d’animaux, ils peuvent avoir besoin de supplĂ©menter leur troupeau en Ă©nergie, ce qui peut annuler toute Ă©conomie. 

Les polycultures peuvent être mises en balles, pâturées ou ensilées. Les mélanges peuvent être simples et composés de quelques plantes fourragères annuelles courantes telles que des céréales, une légumineuse et une brassicacée. Ils peuvent également être complexes et personnalisés et inclure vingt espèces ou plus dans le mélange.  

5. Attention au pourcentage d’espèces dans le mĂ©lange et Ă  l’impact que cela peut avoir sur la qualitĂ© du fourrage. Par exemple, le Dr Lardner sait d’expĂ©rience qu’il ne faut pas dĂ©passer 20 % de brassicacĂ©es dans le mĂ©lange. « S’il y en a trop, vous pouvez rencontrer des problèmes de niveaux Ă©levĂ©s de soufre, de nitrates et de potassium qui sont antagonistes avec le magnĂ©sium », explique-t-il.

6. Envisagez la lutte contre les mauvaises herbes avant et après la culture. « Avec une polyculture, vous ne pouvez pas appliquer de traitement en cours de culture, donc si vous avez des mauvaises herbes nuisibles, ou celles qui veulent persister, il vous faudra peut-ĂŞtre plus d’herbicides, plus tard, pour vous aider Ă  les contrĂ´ler », explique Jocelyn. « Nous avons toujours eu des problèmes avec la pression des mauvaises herbes, et certaines d’entre elles peuvent avoir des effets nĂ©gatifs sur la qualitĂ© », ajoute Dr Lardner.   

7. Utilisez ce que vous avez. Pour le mĂ©lange et l’ensemencement des polycultures, les Velestuks choisissent d’utiliser le matĂ©riel dont ils disposent dĂ©jĂ . « Pour mĂ©langer les espèces de semences, nous utilisons un moulin Ă  mĂ©lange et nous semons le tout avec notre semoir pneumatique », explique Jocelyn.  

8. Trouvez un Ă©quilibre avec la profondeur de semis lors de l’ensemencement de plusieurs espèces. Jocelyn explique qu’avec leurs polycultures, ils sèment tout relativement peu profondĂ©ment, mais Ă  une profondeur d’environ trois quarts de pouce. « Il faut qu’il y ait de l’humiditĂ© », recommande-t-elle. 

9. Évitez de faire paĂ®tre les champs avant le gel. Une saison, les Velestuk ont inclus du triticale d’hiver dans leur mĂ©lange de fourrage vert, avec l’idĂ©e que le triticale servirait de culture de couverture après l’ensilage. « Une fois l’ensilage rĂ©coltĂ©, le triticale a effectivement poussĂ© et nous avons fait paĂ®tre les sections clĂ´turĂ©es, mais les sabots sur le chaume tapent vraiment beaucoup le sol », prĂ©vient-elle.  

10. Sachez que les polycultures peuvent nĂ©cessiter une gestion des risques d’entreprise spĂ©ciale. Jocelyn fait remarquer que les programmes de Gestion des risques d’entreprise peuvent ne pas soutenir les polycultures aussi facilement que les cultures de produits de base monospĂ©cifiques. Les agriculteurs doivent dĂ©terminer si les avantages des polycultures l’emportent sur le risque de pratiquer une culture qui ne peut potentiellement pas ĂŞtre assurĂ©e. 

11. Gardez l’esprit ouvert quant Ă  l’utilisation finale des polycultures. « Les producteurs peuvent utiliser la culture pour l’ensilage ou comme engrais vert, c’est une opportunitĂ© », explique Dr Lardner. Les polycultures peuvent Ă©galement ĂŞtre utilisĂ©es pour le pâturage en tant que culture sur pied ou comme fourrage en balles.  

12. N’oubliez pas que les mĂ©langes de plantes fourragères vivaces sont Ă©galement des polycultures. L’incorporation de mĂ©langes de plantes fourragères vivaces dans les rotations Ă  court terme a Ă©tĂ© l’une des plus grandes rĂ©ussites de la ferme Velestuk. Ils ont utilisĂ© de l’avoine contre-ensemencĂ©e Ă  du trèfle doux Ă  fleurs jaunes, du sanfoin, des bromes, de l’Ă©lyme Ă  chaumes rudes et de la flĂ©ole des champs. « L’objectif Ă©tait de produire des fourrages Ă  court terme, pour une durĂ©e de trois Ă  cinq ans, mais lorsqu’ils produisent si bien, il est difficile de les retirer de la production. Nous en sommes Ă  la sixième annĂ©e, et les rĂ©sultats sont encore très bons. »

Les avantages que procurent les polycultures peuvent faire en sorte qu’elles conviennent Ă  de nombreuses exploitations Ă  court ou mĂŞme Ă  long terme. Cependant, de nombreuses variables entrent en ligne de compte dans les dĂ©cisions de culture. « Cela dĂ©pend de beaucoup de choses : de l’Ă©tat de nos finances, nos prioritĂ©s ou dĂ©fis pour l’annĂ©e, l’Ă©volution des marchĂ©s, les Ă©vĂ©nements mondiaux », explique Jocelyn Velestuk. « La science peut parfois donner des moyennes, mais il n’y a pas de prescription pour l’agriculture et chacun doit adapter la science Ă  la situation de son exploitation », conclut-elle.   

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